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vlad
13 février 2006

Zane il est pas joyeux

http://hauteurs.canalblog.com/archives/2006/02/13/1367176.html

Tous les soirs il y a des gens au petit théatre en noir et blanc. Et quand ils partent, on éteint les lumières. Moi j'arrive le matin, quand tout est froid et quand tout est noir dans la salle. J'allume partout alors, et on voit bien alors que les sièges sont rouges. Le rideau, lui, est bien noir - une lubie du créateur - mais comme de toute manière il ne se ferme que face au public, le plus souvent il est levé. Un théatre vide c'est déjà un spectacle.
J'entre dans la salle par les coulisses, comme toujours. Je descend de la scène avec mon aspirateur, et je passe dans chacune des allées. Arrivé à celle du cadavre, j'éteins mon appareil. Aujourd'hui c'est une fille. Encore une qu'on ne pourra plus draguer. Je me demande quand même comment ils font, chaque fois, pour viser juste alors qu'il y a les projos qui les aveuglent. Je la regarde encore un peu, pendant la minute de silence. Puis, je ferme ses yeux et prend le corps dans mes bras pour l'apporter à coté de la réserve de sacs. Faut avouer qu'ils ont tout prévu depuis la première du spectacle.
Une fois le mort emballé, le gars de la morgue, qui est arrivé entre temps, m'aide à l'installer dans son camion, et il l'emmène là où il faut. Moi je finis mon ménage. Les jours de chance, je trouve des pièces coincées dans les sièges, ou alors par terre.
Quand la salle est faite, je remonte sur scène. Je contemple mon boulot, en me disant que les gens qui ne sont pas là pourrait m'applaudir aussi. Mais ils ne remarquent jamais quand tout va bien. Il se plaignent juste quand ils voient de la poussière ou un chewing-gum collé quelque part.
Enfin bon. Je finis quand même mon job. Je passe l'aspirateur, puis la serpillère sur scène, même si elle n'en a jamais besoin. Je n'ai pas le droit de toucher aux coulisses, ou aux accessoires: ils ne veulent pas que je farfouille. Alors je m'en vais.

Je ne croise jamais les acteurs. Par contre, dans la rue, tous les gens sourient. C'est comme ça depuis la création du petit théatre. Faudrait que je regarde le spectacle un jour. Mais j'ai pas assez d'argent pour me payer une place. Et puis de toute façon, le soir, je vois mes amis. Ils font de l'impro. C'est que des amateurs, mais ça me fait déjà marrer.

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Commentaires
V
je suis content que ça te plaise!! je l'ai écrite vraiment juste après avoir lu ta nouvelle que je trouvais trop pessimiste... mais très belle.
Z
Maintenant j'ai moi aussi le sourire jusqu'aux oreilles...<br /> Merci beaucoup pour cette suite, qui colle parfaitement au début, j'aime beaucoup.<br /> bien joué!
vlad
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